Part 4
Gros comme un moteur de Clio, le carburateur avait manifestement un problème. Pourtant j’avais contrôlé tous les règlages. Mais maintenant, malgré les 12 000 cc du V12 inversé qui me crachaient à la gueule, j’entendais bien un claquement. Surement un volet qui avait du perdre sa clavette, et qui laissait passer plus d’air que prévu, d’ou la difficulté de tenir au ralenti les 600 chevaux du bon vieux Renault Snecma. Heureusement, l’hélice avait été calée un poil en réverse pour m’éviter de perdre mes cheveux. Au bout de l’aile du bombardier MD 311, en limite de la zone de sécurité, j’appercu un copain qui faisait tout pour que je le remarque. Je mis les bras en croix en direction du poste de pilotage et le moteur se tut en crachouillant.
En quelques enjambées j’étais au bout de l’aile.
- J’ai trouvé ce que tu cherches, un pépé serrurier qui part à la retraite, il brade tout et il parait qu il vend aussi une camionette !
Je cherchais un véhicule atelier pour les courses de cote et pour trimbaler les machines.
7 ou 8 ans avaient passés depuis la trouvaille de ma 600 Sarolea.
J’avais eu une bleue pour mes 14 ans pour aller à l’école, ensuite passé mon permis dans les premiers jours de mes 16 ans. Ma premiere moto avec papiers fut une 250 cc R 27 BMW, trés vite suivie d’un R 50/2, toutes deux ex-gendarmerie, un R 60/2, R 69 S et un paquet d’anglaises de toutes sorte, mais j’y reviendrai.
Aprés des études techniques, je me retrouvais dans l’armée de l’air, mon but, étant de toucher à ces gros moteurs.
On était en 1973 je m’étais marié l’année d’avant, et je roulais avec un R 60/5 tout neuf attelé à un side Bufflier que j’avais déniché 4 ou 5 ans avant, et que j’avais fait passer par différentes évolutions. D’origine c’était un petit side des années 40 pour monter sur une 250 cc, donc très bien pour un R 50/2 puis 60/2, mais comme il n’avait pas de suspension, j’avais coupé un arrière de 175 cc Motobecane que j’avais soudé au chassis pour avoir une suspension coulissante ( sans complexe ). Puis en vue de mon mariage, je me suis dit que ce n’était pas très sèrieux et pour le monter sur la 60/5, j’ai acheté un chassi GEP à Valence, avec suspension à barre de torsion comme sur les Renault 4, tout en gardant la caisse d’origine, mais en la fermant en contre-plaqué marin, avec porte papillon comme la Mercedes.
C’est donc avec cet engin que j’arrivais avec mon copain chez le serrurier, dans un village près d’Avord ou j’étais en poste.
Présentations avec un très gentil monsieur de 78 ans qui fermait son entreprise, car son arpette avait voulu partire à la retraite à 68 ans.
Bof, une autre époque quoi !
Quelques instants plus tard, nous étions dans l’atelier en longueur ou tout était dans un état nickel, rangé, organisé, impressionnant. Tout au fond, la camionette. J’en restais un peu sur les fesses. Je m’attendais à une estafette Renault, ou un Peugeot. Non non, pas du tout, sous une bache, dépassait le museau d’une CitroenRosalie 11 cv de 1935. La bache par terre, la Rosalie couleur sable avait été carrossée par le patron lui-même en camionette fermée, c’etait un très beau travail à l’image de l’atelier.
2800,00 Francs mais avec ce qu il y avait à l’interieur de la voiture pour débarasser.
Intrigué, je me dirigeais vers l’arrière, ouvris les 2 battants.
Mon cœur se mit à battre plus fort !
Je ne sais pas si c’est très normal d’avoir autant de chance dans la vie, mais à ce point la, ca relevait de la superstition, je n’étais pourtant pas cocu, ou alors je ne l’ai jamais su. Toujours est il que je me suis quand meme demandé si je ne rèvais pas.
Derrière moi la voix un peu génée du gentil monsieur dit :
- Vous saurez bien quoi en faire, vous roulez déja en moto…. et puis … mauvais souvenirs….mon fils……
Je n’entandais plus.
Ce que je voyais à l’interieur, je connaissait parfaitement bien, mon copain Ed en avait acheté une 3 ans plus tot, et j’avais roulé avec plusieurs fois.
Ce qui m’a fait la reconnaître, c’est le cadre Featherbed, puis le 750 bi vertical que je voyais de l’arrière par l’échancrure du carénage , le gros 4 cames ‘’John Tyckel RE ‘’ à l’avant, pas de circuit éléctrique ni feu arrière, 2 gros mégaphones, une Norton Domiracer équipée pour la piste, avec 7 ou 8 cartons de pièces plus ou moins neuves.
Bien sur, je conclu l’affaire et j’ai gardé la Rosalie presque vingt ans. Lorsque je suis devenu antiquaire, je m’en servais pour aller chiner et faire mes livraisons. Elle démarait au quart de tour à la manivelle bien sur, et marchait aussi bien qu’une voiture moderne.
Bon, je n’avais toujours pas de camionette atelier mais j’avais une machine de course en plus de mon 250 Tss Bultaco. ( c’est une autre histoire )
L’euphorie passée, il me fallut bien reconnaître qu’il y avait un énorme travail de réféction pour remettre la Norton en route, mais pratiquement toutes les pièces étaient fournies. Ca me prendra quand meme 2 ans, j’étais bidasse ne l’oubliont pas et ca occupe pas mal ! Mais elle terminera en version route avec un des premiers frein à disque Dunlop, bof.
Dans l’immédiat, ma principale préoccupation était de donner du boost à ma R 60/5 qui avait presque plus de mal que la R 60/2 à tirer le side. Ce fut fait avec une 2 em bougie sur chaque cylindre, un 2 em jeu de vis platinée sur le plateau d’allumage, aprés avoir légèrement agrandi et poli les pipes d’admission, 2 carbus 4 ou 5 mm plus gros, des pistons forgés. Transformation des pot d’échappement qui d’origine étaient en 3 parties, cone-droit-cone, élimination de la partie centrale droite à la scie à métaux et brasage des 2 cones à l’argent pour éviter de rechromer. Quelle musique ! Tout ca avec de l’essence 130, ca marchait beaucoup mieux. Pour le freinage, un disque de R8 Gordini à l’arrière de la moto, bien sur ne pas en abuser en solo ! L’idée des 2 bougies en plus, je l’avais prise chez Jean Murit qui montait ses machines de courses de cette manière. Pas miraculeux, mais ca permettait une combustion optimum et le montage des plus gros carbus. On devait quand meme gagner une dizaines de chevaux, ce qui somme toute n’était pas négligeable, pratiquement mieux qu’un R75/5.
Alors, vous allez me dire, ce n’est pas de l’aventure tout ca ! Oui mais ca y mène, comme la traversée près de La Clusaz du col des Aravis fermé à la circulation à 3 sur le side !
Evolution d'un Bufflier
Norton Domiracer
Col des Aravis