Scènes de genre avec Daniel AUTHOUART

Un grand frère qui m'a donné mes premiers pinceaux et mes premières toiles à l'époque où, alors que j'étais son élève, "je m'voyais déjà" artiste peintre...

A 14 ans Daniel quitte l'école avec le certificat d'Etudes Primaires. Trop jeune pour rentrer à l'école des Beaux-arts de Rouen, il patiente en dessinant, conseillé par le peintre Gustave Legros qui, pour premier exercice lui fait copier "Au Moulin Rouge" de Toulouse-Lautrec. La peinture se révèle à Daniel. Sans doute suite à cela, Daniel se rend fréquemment au musée des beaux-Arts dont il admire "La flagellation du Christ à la colonne" du Caravage. A 16ans, Daniel peut rentrer à l'Ecole des Beaux-Arts de Rouen où il étudie successivement la peinture, l'architecture intérieure et la publicité.
Il entre à l'Education Nationale en 67... qu'il quitte en 1974 pour se consacrer exclusivement à la peinture.
Il est exposé aujourd'hui dans le monde entier.

Super un nouveau!...
Cette 1ere toile me fait déjas voyager sur la 66.

vivement la suite .....

Oberon

A la recherche du temps perdu sur fonds de polar et d'angoisse...

aaaaaah alors là, moi qui ne suit pas spécialement féru d'art, bah là, ça pouvait pas mieux tomber !
grand amateur des oeuvres d'Authouart je suis.
des oeuvres fouillées, truffées de détails de toutes époques, des perspectives hallucinantes, des légendes américaines et des détails soignés... tout ça en une seule toile.

j'ai d'ailleurs une belle litho dédicacée par le maître qui orne mon salon : Manhattan Colors.
ci-dessous une photo de l'oeuvre trouvée sur le net, un poil sombre :

chouette un nouveau dessinateur ! et pas n'importe lequel.
Il y a quelque chose BD là dedans, c'est à dire qu'on voit où imagine une histoire, assez surréaliste d'ailleurs, qui prend notre imagination par la main
Dans le dernier tableau montré par Dragoo, c'est toute l'histoire de l'Amérique
...à remarquer la symbolique des journeaux froissés et effeuillés

on attend les prochaines, merci

Désolé Obéron, là je n'accroche pas. Impression bizare.
Que veut-il montrer?
Une ambiance B.D., je trouve aussi.
Une maîtrise du dessin, c'est clair, le tout dans une lumière 'post accident nucléaire' pourquoi?
Ambiances glauques ou de fête foraine,il y en a de trop, l' Amérique selon lui?
Je suis très réservé...
Mais tu tu vas nous expiquer çà, hein!

Ce ne sont peut-être pas mes préférées, mais j'aime bien.

Je trouve des "clichés", du rêve d'une certaine idée de l'Amérique, mais aussi un grand souci du détail et un monde de rêve.

Chaque dessin est un rêve, sans vraie logique, sans un véritable message, mais surtout, une ambiance, réussie jusque dans les détails.

Ca me parle, comme un monde imaginaire, ça raconte une sorte "d'histoire parallèle" à la réalité, où tous les détails sont vrais, mais leur association "décalée".

Le deuxième sessin, surtout, avec les vieilles enseignes délabrées, signes d'un temps passé où elles ont brillé.
Une sorte de quartier qui tombe dans l'abadon ... On retrouve le thème des "belles abandonnées".

Merci pour ces images pleines de rêves.

Daniel Authouart est de cette génération qui a grandi dans l'immédiat après-guerre. Enfant fasciné par l'American way of life, puis jeune homme de 68, de Woodstock et de paix au Vietnam, il reste épaté par les Etats-Unis et notamment New York pour le condensé d'occident qu'il nous offre : société du spectacle et de la consommation, du jeu et de la décadence, du paraître et de la violence, de l'avoir plutôt que de l'être.

Le tableau suivant, "Canal Street", illustre cette fascination sans être dupe de sa fonction et de sa superficialité. Fragilité et vacuité du décor dans lequel se meuvent des personnages multiples : une Marylin qui semble y croire ou fait semblant, un jeune blouson de cuir interpellé par les journaux, eux-mêmes emportés par le vent de l'histoire ou plus simplement par la succession des jours sans vie...
Au fond, vous distinguez un paquebot. C'est celui du film de Fellini "8 et demi", autre référence récurrente chez Daniel.

Ben, autant j'apprécie les nombreux artistes que tu nous a fait connaitre (pour moi en tous cas) et qui ont dessiné ou peint nos motos avec poésie, autant je suis toujours réservé avec ton petit dernier.

Un peu cliché, non? pour une représentation de l'Amérique.

J'ai vécu quelques mois à Lakehurst en 1974, j' avais 24 ans. Pas bien longtemps donc après 68. Stage sur la base...aviation militaire... A la fin de la guerre du V.N.

Bien sur nous sommes allés à N.Y. et avons connus des Ricains de toutes origines et de tous milieux. Nous avons vu la ville, de nuit, de jour, les bars, les rues, tout.
C'était pas cette ambiance. Pas cette impression de fête forraine ou d'excès en tout.

Le gros souvenir que j'en ai : L' Américain moyen guère mieux loti que le Français moyen, grosse débauche technologique, bien visible mais pas pour tous.
Les gens travaillent dur, sont assez patriotes (est-ce une tare?).

Pas ces clichés.

Moi, je ne suis jamais allé aux States ...

C'est peut-être pourquoi je reçois mieux ces images

Comme toi, je suis persuadé qu'elles ne collent pas à la réalité - c'est une évidence.

Non, ce que j'en 'apprécie justement, c'est le rêve ...

Le cavalier indien dont le chaval ne touche pas le sol, les prospectus qui font à la fois partie du tableau et qui en sortent comme un "pont" entre l'imaginaire et la réalité, tous les "symboles "irréels de l'Amérique" etc ....

Tout est faux, mais l'ensemble n'est construit qu'à partir de vrais détails, sortis de leur contexte, pour raconter autrechose.

Cet autrechose, c'est un rêve qui me parle ... un peu comme quand je me réveille et que je garde pendant quelques instants quelques bribes de souvenirs du dernier rêve que je faisais quelques secondes avant que mon réveil sonne.

Il y a beaucoup d'imagination dans tout celà, et ça le plait.

... Bien plus, par exemple que le dessin d'un détail de moteur de moto qui n'a aucune autre ambition et rien d'autre à dire que de se montrer ...

Olivier a tout compris de l'univers d'Authouart. En effet, Daniel n'est pas journaliste reporter mais artiste peintre. Il ne décrit pas, il utilise des images pour ensuite, en les juxtaposant dans des collisions étonnantes, évoquer son imaginaire et créer de manière "sensible" de nouvelles images. La BD ? oui bien sûr, mais aussi le cinéma.
Les croquis sont pris sur place pour s'imprégner de l'ambiance qui, "digérée", permettra de donner à l'histoire racontée une certaine crédibilité. Pas un hasard si nombre de ses clients sont américains, surtout Newyorkais.


Au centre de l'image, Charlot et le Kid regarde passer un héros de film noir et sa fiancée...

Oui...
La dernière image est très différentes des autres je trouve.
Bien sur je regarde tout çà sans avoir aucune culture en la matière, uniquement avec ma sensibilité et donc sans prétention.
N'empèche, autant les premières images me donnaient l'impression d'une exposition de savoir faire d'un bon artisan,autant la dernière me fait plus penser à l'oeuvre d'un artiste.
Avis sans aucune prétention toujours.

Looping, je crois simplement que tu n'avais pas pris le bon filtre de lecture au départ !

Voici ce que disait Daniel il y a un an environ :
"La terre est un grand village dont la grand’rue se trouve, quelque part, aux alentours de Broadway et de la 7th avenue.
C’est là que se croisent toutes les énergies ; et pour qui sait en observer les signes (comportements, publicités, informations), c’est de là que l’on peut voir comment change le monde.
Ma manière d’enregistrer ces changements consiste à m’arrêter au long des trottoirs et à dessiner ce que je vois. Je laisse vagabonder mon esprit en observant le grouillement des gens qui s’agitent dans ce décor de folie, bercé par la bande son cacophonique de la ville.
Pendant que je dessine, mes idées se bousculent, s’assemblent, se disloquent … C’est souvent bien plus tard, à l’atelier, quand je travaille d’après ces notes, que tout ce fatras prend son sens."

Daniel, en flagrant délit de repérages...


Ou encore...
"Je construis mes tableaux comme des grands romans, ceux que j’aime, comme les livres de John Irving, par exemple. Vous savez, ces romans à tiroirs, construits autour de petites histoires qui se mêlent, se croisent et embarquent le lecteur vers un autre ailleurs."
"J’ai, comme tout le monde, un rapport de fascination à la culture américaine, une fidélité aux cow-boys et aux Indiens des films de mon enfance, et un éblouissement devant les lumières de Time Square" .

Au fait, tous les travaux que je vous présente sont réalisés à l'acrylique.

Pas le bon filtre de lecture, filtre, filtre, est-ce que j'ai une gueule de fltre???

Peut-être son "rapport de fascination à la culture américaine", que je partage très moyennement me rend t-il un peu hermétique.
Je trouve toujours la dernière image très différente des précédentes. Plus d'unité.
Faut-il de l'unité en peinture comme au théatre?

Je t'ai un peu trompé... l'image à laquelle tu fais allusion n'est qu'un détail d'une toile qui s'appelle " Movie street" fourmillant de clins d'oeil au cinema américain. Il est amusant de les repérer, d'autant qu'une moto y figure...

Un peu comme une phrase sortie de son contexte...
Ca peut tromper son monde.
Non, décidément, là, je n'accroche pas.
Manque de culture ou d'ouverture d'esprit, je ne sais pas.
Je suis toujours sur mon impression de travail d'un bon artisan plutot que d'un artiste.
A mes yeux en tous cas.

Je ne peux guère ici développer plus avant son travail puisqu'il me faut me recentrer sur ce qui fait l'objet de cette rubrique "Art et mécanique".
Mais je comprends tout à fait ton point de vue Looping. J'ai moi-même préféré un style de travail antérieur de Daniel qui m'apparaissait moins anecdotique, moins décoratif.
Mais c'est une autre histoire...

Au fait, Ob
Doit-on regarder une peinture, au premier abord, dans sa globalité ou la détailler pour y trouver son compte ou sa valeur, la décortiquer ?
Ce n'est réellement qu'une simple question.
Certaines oeuvres me 'parlent' immédiatement.
D'autre non. C'est le cas de celles de Daniel.
Pas de jugement de valeur de l'artiste là, simplement une impression générale.

looping a écrit:...
Doit-on regarder une peinture, au premier abord, dans sa globalité ou la détailler pour y trouver son compte ou sa valeur, la décortiquer ?
.

Je vais laisser Obéron répondre, mais je ne peux me retenir de mettre mon grain de sel ...

En bon Normand d'origine, j'ai envie de dire que "ça dépend" ...

Ca dépend de l'oeuvre ... certaines ne sont pas faites pour être détaillées, c'est l'ensemble qui crée la force et l'émotion. J'ai ici dans l'idée des peintures d'impressionnistes dont seul l'ensemble est visible et a du sens, le détail des reflets dans l'eau, par exemple, n'étant pas visible sorti de son contexte.

Ca dépend aussi de l'observateur et de ce qu'il recherche, de ce qu'il ressent.

Globalement, s'il ne fallait qu'une réponse, une bonne démarche est d'aller de la globalité vers les détails qui la construisent et qui parfois l'expliquent.

Dans toutes les images que je remercie Oberon de nous avoir montrées, j'ai parfois été fasciné par les détails (je repense encore au reflet dans le miroir convexe du mariage de ... - je ne sais plus par coeur le nom - et à beaucoup d'autres encore).

A d'autres moments, c'est plutôt l'ambiance générale que j'ai trouvé très forte, les détails ne servant éventuellement qu'à expliquer ou renforcer.

Boris Vian disait : regarder un tableau et dire "je ne comprends pas" c'est comme prendre un melon, le mettre à son oreille et dire : "ça ne sent rien".
Comme dit Olivier "ça dépend". Cela dépend, non de l'oeuvre qui est sous tes yeux mais du regard que tu souhaites ou que tu peux porter. Si l'approche première est forcément globale et te fait réagir ou non, suscite une émotion ou non, elle peut être suivie d'une analyse plus circonstanciée. La construction, les volumes en place, les couleurs et leur harmonie, le mouvement, sa place dans un contexte artistique et historique, l'interprétation qui naîtra de ton regard plus ou moins fouillé t'apportent ou non un plaisir, un émerveillement ou... rien du tout.
Mais ce qui est sûr et valable pour toute chose : le regard s'éduque et toute oeuvre peut faire l'objet d'une analyse approfondie. C'est ensuite affaire d'envie.

Pour Olivier, il s'agit des époux Arnolfini (de Van Eyck).

Je comprend tout à fait Daniel AUTHOUART, assis sur un trottoir de Manhatan, se laissant infuser dans l'atmosphère de cette ville, qui n'est pas une ville mais une véritable fiction.
Je n'y suis allé qu'une fois, mais j'ai été fasciné par Manhatan. Je n'arrêtais pas de regarder, en haut en bas, sur les côtés, les gens, les visages des gratte-ciel, les boutiques...
C'est une ville parfaitement surréaliste, extra-terrestre, mégalopolis spatiale... bref
j'ai regardé manhatan comme Alice regardait son pays des merveilles. Et je m'y sentais bien, paradoxe des paradoxe !
Alors je peux comprendre l'explosion de l'imagination de Daniel , l'apesanteur, l'intemporel de ses réalisations...

... et comme jaimerais descendre et remonter toutes ses avenues en Harley !!

Hommage au cinema américain des années cinquante avec "Bus stop" film de 1956 avec Marilyn Monroe que l'on voit sur l'écran noir et blanc. Beaucoup d'allusions émouvantes à Marylin avec en particulier le titre "the river of no return" , magnifique western avec Robert Mitchum (à droite) qui fut son premier grand film ; et "The Misfits" ("les desaxés" en français)à gauche, film dramatique de John Huston (1961), dernier film de Marylin avec Clark Gable et Montgmery Clift. En lettres rouges, "les hommes préfèrent les blondes" de Billy Wilder.



Et toujours ces grandes lignes de fuite suggérant la modernité, l'optimisme et le dynamisme néanmoins atténués par la relative décrépitude du décor comme pour signaler : attention, tout cela ne dure qu'un moment...

Dans le même esprit que la toile précédente, "Detective". Le détective qui sort du cabriolet Jaguar avec sa poupée est Rip Kirby, héros de BD policière des années 60. On aura reconnu en bas à gauche le faux insert d'une photo d'Humphrey Bogart et Lauren Bacall, icônes du film noir américain.

Une nouvelle fois, "l'ambiance" me fascine.

Entre le coté droit de l'image "non construit" (c'est à dire avec une absence de front continu de façades d'immeubles), et l'intérieur du bar, à gauche, tout de rouge revêtu ...

C'est d'autant plus étonnant que les façades de gauche sont anciennes, surchargées de détails.

La rue marque comme une frontière entre la ville et sa vie nocturne (en référence à toutes les senseignes lumineuses) et le no man's land de droite.

Tout celà aiguise ma curiosité, me fait m'imaginer des histoires ... j'adore.
Et encore, n'ai-je pas les références des films américains auxquels cette toile fait des clins d'oeil.

"Une Cadillac pour Marylin"

Le vaisseau s'est ensablé dans les souvenirs accumulés et le fantôme libéré s'en retourne vers nos rêves engloutis.